(capture) opportunité

comme d'habitude, tu t'agites derrière le bar avec aisance. t'as l'habitude zakaria. de mixer les éthanols, de les secouer, shaker, pour en faire d'étonnants cocktails. étonnamment ce boulot, sensé n'être qu'une façade, s'est révélé depuis plusieurs années maintenant un réel plaisir. mais t'oublies pas ce pourquoi tu t'as été engagé par la team rocket. pour vendre du rêve, de la poudre dodo en fonction des commandes. récupérer les sous également. parfois en montrant les crocs. mais aujourd'hui c'est une autre raison qui te pousse sans cesse à vérifier l'heure. un de tes potes de la team rocket qui t'as refilé le tuyau. un jeune dresseur débutant, tout neuf, tout frais. un riolu acheté à l'animalerie à prix d'or, mais sa pokéball encore scellée. le moment parfait pour agrandir ton équipe, pour en améliorer l'efficacité au combat. et un riolu, c'est la grande classe quand même. alors ce soir, t'attends la fin de ton service avec une insolente détermination.

{HAUTES HERBES} | 20

agilement, tu déposes les deux verres de margarita sur le bar immaculé. — et voilà. ta voix qui se fait pressante, mais t'esquisses quand même un sourire aux deux jeunes qui ne manquent pas de rougir. c'est trop facile. ton air un peu juvénile surprend parfois les gens, mais ton regard ne laisse pas de marbre. t'es presque déçu de ne pas pouvoir t'attarder au casino ce soir. après ton service t'en aurais profité pour aller discuter avec ces deux charmantes demoiselles, leur offrir encore quelques verres. faire connaissance. et peut-être en faire plus ample connaissance. mais en te retournant tu sais que c'est pas possible. pas cette nuit. t'as clairement plus important à faire que de draguer et te lancer dans une aventure charnelle passagère. — alors, c'est quoi tes plans pour ce soir ? noé, l'un des autres serveurs, qui passe à côté de toi, un plateau de flûtes de champagne en équilibre. un sourcil qui se fronce, parce que vous êtes pas tellement potes. ça fait plus de cinq ans qu'il bosse au casino, et se trouve encore au poste de serveur. au bas de l'échelle. son manque d'ambition qui t'énerve à chaque fois. la trentaine bien entamée, tu ne lui prédis pas un grand avenir au sein de la team rocket. — sortir, me péter la tête, comme d'hab quoi. t'es volontairement provocateur, un brin hautain, mais tu t'en fiches. t'apprécies pas noé, et tu tentes à chaque fois de le lui faire comprendre sans l'envoyer péter avec trop de violence. encore dix minutes zeke, et tu pourras filer.

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ses lèvres qui se plissent, vexées. — c'est bon, pas besoin d'être désagréable. il soupire en s'en allant distribuer ses flûtes, la mine renfrognée. quel con. décidément vous ne serez jamais potes noé et toi. mais tu relaies bientôt sa présence à un vague souvenir en servant un dernier cocktail. tu remarques au loin les deux jeunes femmes qui t'observe derrière une machine à sous. un clin d'oeil savamment lancé, parce que tu ne sais jamais ce que le futur a prévu pour toi. bam. c'est l'heure. passant le relais au serveur suivant, tu files dans les coulisses de l'établissement. les couloirs où seuls les membres de la team rocket s'aventurent, leurs secrets jalousement gardés. dans le vestiaire, tu troques ton costume contre un jean noir et un col-roulé sombre. ta doudounne qui vient compléter ton habillement, et te voilà dans la rue. ton élément. ça pue. mais c'est normal, c'est jadielle. le bitume sale, les voitures qui crachent leur merde dans l'air. t'es habitué depuis gosse zeke. c'est chez toi. et cette nuit, tu vas rendre visite à quelqu'un.

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tu connais l'adresse exacte, pas besoin de plan pour te repérer dans la ville. tu connais chaque rue comme ta poche. tu pourrais t'y diriger les yeux fermés. capuche sur la tête, les mains dans les poches, t'es qu'un fantôme parmi les spectres, personne ne fait attention à toi. t'emprunte les rues où personne ne s'aventure. tu croises deux autres drealers de la team rocket. un bref hochement de tête et tu continues. t'as pas le temps. une heure du matin. la plupart des habitants de la ville qui dorment, profitant de la nuit et du répit offert par l'obscurité. toi tu t'y noies, tu y vis. l'obscurité comme refuge, comme compagne d'aventures. ce soir tu vas en avoir besoin. après une quinzaine de minutes t'arrives enfin devant la maison. tu vérifies le numéro. 113. c'est là. d'après les infos de ton pote aucun pokémon ne surveille l'entrée. ni le jardin. d'un geste instinctif, comme pour te rassurer, tes doigts qui tâtent ta pokéball. kada bien au chaud, prêt à jaillir pour voler à ton secours si besoin. t'as déjà tout prévu. tu sais parfaitement comment repartir d'ici avec un riolu.

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la maison plongée dans l'obscurité t'inspire confiance. le jeune homme qui doit sans doute rêver du lendemain, de son début de voyage en tant que dresseur. t'as pas la moindre trace de remords en toi zakaria. s'il n'est pas assez fort pour se défendre, il sera happé par la dure loi de la jungle. la loi qui règne à jadielle, la loi du plus fort. et t'es indéniablement un lion zeke. un prédateur, un chasseur. alors t'es presque étonné par la facilité avec laquelle le petit portail entourant un jardin parfaitement entretenu s'ouvre et coulisse sans un bruit. pas d'alarme. pas de hauts grillages. pas de snubull qui garde le jardin. c'est trop facile. tu te glisses tel un ectoplasma jusqu'à l'arrière de la maison. une porte vitrée qui donne sur le jardin. c'est le moment le plus délicat. celui qui peut décider de la suite de ta nuit. d'un bref rayon lumineux, kada qui se matérialise devant toi. intelligent, il capte très vite la situation. c'est le moment de se faire discret. — ouvre. sans bruit. ton doigt qui pointe la porte, ta voix qui chuchote, qui se fond dans la nuit. le pokémon insecte qui sait parfaitement ce que t'attends de lui. la pointe de sa faux qui s'insère très lentement dans la fente de la porte. de véritables rasoirs géants qui d'un coup sec, ouvrent la serrure. découpée nette. immobiles comme des statues, vous attendez. de voir si quelqu'un a entendu le bruit sec de votre effraction. tu respires calmement zeke. tu t'y forces. parce que l'adrénaline qui pulse dans tes veines te donne envie d'action, de vitesse. mais c'est pas le moment. alors tu fermes les yeux, tes paupières qui te plongent dans l'obscurité. dans le calme.

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imbibé par le calme de l'obscurité, t'oses enfin bouger. pas un bruit dans la maison. t'entres dans ce qui semble être une cuisine. tes yeux qui mettent quelques temps à s'habituer au pénombre, mais la fenêtre laisse filtrer la lumière du lampadaire de la rue. tu peux sentir ton coeur cogner contre ta poitrine. t'as beau ne pas avoir peur, tu sens ton sang qui bouillonne. les muscles tendus, prêts à courir en cas de danger. derrière toi, tu peux sentir la présence de kada. ça t'apaise. si quelque chose dégénère, il sera là. déjà tes semelles qui avalent les escaliers, vers les chambres à l'étage. si proche du but, t'ignores si tu vas réussir. si t'es pas en train de faire une connerie. sûrement. mais t'es né pour ces moments zeke. pour briller dans l'ombre. pour t'envelopper d'obscurité. devant la chambre du futur dresseur, tes lèvres s'étirent en un sourire satisfait quand tu vois la porte entre-ouverte. putain il est con. vraiment con. les gonds parfaitement huilés et silencieuse. l'intérieur de la pièce parfaitement rangé. rien ne dépasse. pas comme chez toi, avec tes habits qui traînent partout. sur le bureau, un pokédex, et juste à côté ... victoire. une pokéball. sa seule et unique. t'en connais un qui va devoir repousser son rêve d'aventures et de dresseur. c'est pas trop problème. les doigts légèrement tremblants, t'attrapes la sphère bicolore. le myocarde qui accélère, ta bouche aussi sèche qu'un désert. tu jettes un regard paniqué en direction du lit. tu peux voir une masse sombre sous la couette. il ne se doute de rien. faut bouger. faut dégager zeke. sans te faire griller.